30 avril 2024

Ilunga ‘‘Police belge’’ : «Je ne me suis jamais senti discriminé, parce que j’étais albinos»

Propos rendus par Yves Kalikat et Jean-Hilaire Shotsha

Premier catcheur albinos de la République démocratique du Congo, Ilunga ‘‘Police belge’’ a fait la pluie et le beau temps dans l’univers sportif congolais au plus fort de sa carrière dans les années 80. Né Léonard Ilunga Dianishay, cet athlète adulé par les nombreux fans du catch congolais, pour ses performances sur le ring, s’est éclipsé momentanément de Kinshasa pour aller enrichir son expérience en Afrique du Sud. Aujourd’hui de retour au bercail, Ilunga ‘‘Police belge’’ est fier de la lutte que mène Mwimba Texas pour la revalorisation des personnes vivant avec albinisme. Interview.

Vous étiez l’un des catcheurs albinos les plus médiatisés à Kinshasa aux années 80. Qu’est-ce qui justifie aujourd’hui votre brusque disparition de l’espace médiatique ?

Ilunga ‘‘Police belge’’ : Au crépuscule de ma carrière sportive, j’ai jugé bon d’aller faire la promotion du catch en Afrique du Sud. J’y suis allé en 1998, juste après l’entrée de l’AFDL (Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo, NDLR) pour revenir au pays en 2013. J’ai passé quasiment quinze ans en Afrique du Sud, où j’ai perfectionné le catch. J’ai, par la suite, suivi sur place des cours d’entraineur et d’administration de catch. Maintenant que je suis de retour au pays, j’ai été promu à la Fédération Nationale de Catch (FENACA) où j’assume présentement la fonction de secrétaire général.

Personnellement, qu’est-ce que le catch vous a rapporté après une vingtaine d’années de carrière ?

A notre époque, le catch ne payait pas. Personnellement, le catch ne m’a pas enrichi financièrement, tout comme les anciens sportifs ! Le coût du sport au Congo n’est pas vraiment à la hauteur de nous supporter. Néanmoins, les relations, nous en avons bénéficié. On a eu beaucoup de relations. Et je dois reconnaître, qu’on est respecté.

Comme vous, Mwimba Texas a également porté haut l’étendard des catcheurs albinos qui prestent en RDC. Quel regard avez-vous aujourd’hui de son initiative de lutter en faveur des albinos, à travers sa fondation qui totalise vingt ans en cette année ?

Je sais que c’est dur, le travail que Mwimba Texas mène. Mais, je l’encourage à continuer à ajouter encore un plus dans son parcours, parce que, grâce à lui, nous sommes aujourd’hui réunis. Réunis à travers la fédération des albinos, dont je suis le Secrétaire général. Nous comptons même, dans les prochains jours, lui décerner le titre d’ambassadeur des albinos. Il le mérite, parce qu’il a beaucoup travaillé.

Tout au long de votre carrière, avez-vous été l’objet de discrimination dans le milieu sportif comme bien ailleurs ?

Pas du tout. Je ne me suis jamais senti discriminé, parce que j’étais albinos ! Au contraire, tout le temps, j’étais sur le ring. J’étais très beau, on me chérissait ! Je ne me sentais vraiment pas discriminé, parce que j’étais une star ! Et j’ai eu vraiment beaucoup à travers le catch… J’ai eu notamment la chance de côtoyer les grandes autorités de ce pays. J’ai même dîné avec le feu président Mobutu ! Je suis aujourd’hui connu de beaucoup d’autorités. Et nulle part, je ne me suis senti discriminé tout le long de ma carrière. Je suis personnellement issu des parents qui avaient des moyens et qui m’aimaient sincèrement. A la naissance, mes parents m’ont beaucoup aimé. C’est l’une des raisons pour laquelle je n’étais pas du tout discriminé.

Aujourd’hui, quel est le message que vous apportez aux albinos ?

Les albinos doivent cesser de rester en chambre. Ils doivent sortir, parce qu’ils sont des êtres humains comme tous les autres. Ils doivent oser et non se sous-estimer. Sortez, toquer à toutes les portes. Mwimba Texas a déjà ouvert les portes. Il ne doit pas être là pour vous pousser. Faites aussi comme lui, comme police belge : sortez, allez dans la rue et faites tout ce que vous êtes capables de réaliser. Les gens finiront par vous recevoir.

Message aux non albinos qui font preuve de discrimination

Aux non albinos, vous avez vu que Police Belge et Mwimba sont avec vous, soyez aussi avec les autres albinos. Nous sommes tous des personnes et nous avons le même sang sauf la différence de la peau. Soyez toujours avec nous pour construire notre pays.

 

 

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