29 avril 2024

La RTNC, à quand la vraie télévision du service public ? 

Par Bénédict Mukendi

Les enfants nés en 2001 sont  tombés de leurs chaises Jeudi 24 janvier en RDC à la vue du retournement rapide sinon subite de situation à la Tour de Lingwala. Eux qui n’avaient connu que la symbolique image des journaux télévisés et les émissions de la RTNC, celle de Joseph Kabila, ont eu le privilège d’inaugurer avec la chaîne publique une nouvelle ère : celle de Félix Tshisekedi, nouveau chef de l’État. La RTNC qui autrefois, défendait une doctrine le « kabilisme » disons-le comme ça, se retrouve dans une confusion doctrinale la faisant vite passer à l’autre extrême longtemps honni, rudoyé, privé de temps de parole et d’antenne. Oui, Kabila est parti. Alors, on parle démocratie ?  Félix Tshisekedi longtemps critique sur la partialité de la RTNC va-t-il céder aux sirènes de tartuffes médiatiques ? 

Au Palais de la Nation à Kinshasa Joseph Kabila cédait civilement son fauteuil à son successeur Félix Tshisekedi issu du parti historique de l’opposition UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès Social). Moment émouvant et très scruté dans le monde entier, évidemment avec la retransmission en direct par la Radiotélévision Nationale Congolaise (RTNC). Après la cérémonie, la chaîne publique s’est arrangé à faire passer en boucle un spot à la gloire du nouveau Chef de l’Etat congolais. C’était un condensé d’images tournées pendant la campagne. Cela paraît étrange puisque ces mêmes images n’apparaissaient pas pendant la période de campagne électorale. En ces temps-là, Félix Tshisekedi candidat de l’opposition n’était pas le bienvenu dans la grille des programmes de la chaîne dite « publique ». RTNC s’est donné à faire la promotion de l’autre candidat Emmanuel Ramazani choisi pour être le dauphin de Joseph Kabila. La roue tourne et très vite. Avec l’avènement de Tshisekedi à la tête du pays, la télévision publique congolaise a encore endossé ce qu’elle peut faire de pire : une télévision au service du Président de la République. On pourra remuer ciel et terre, tant qu’il n’y aura pas la vraie indépendance de la télévision publique, sa ligne éditoriale sera toujours basée sur la consécration du Président de la République, de tout son système et l’occultation du reste.

Chaîne publique ou chaîne officielle

Depuis quelques jours, sur les réseaux sociaux, les appels sont lancés pour faire de la RTNC une vraie télévision publique. Je peux faire bloc avec tous ces gens parce j’entends leur souhait. Et après, on fait quoi ? Avons-nous effacé l’histoire ?  L’avons-nous placée sous l’étagère la plus sombre de notre mémoire ? Traditionnellement, la RTNC qui a vu jour en 1966 sous la deuxième république n’a jamais su se baser sur les principes légaux de son fonctionnement. C’est-à-dire une télévision au service de tous les congolais. Elle est souvent confondue dans son statut. Tantôt c’est une télévision d’État, une télévision de propagande de l’action gouvernementale ou carrément une télévision officielle. Pas une télévision publique. Elle n’a jamais œuvré pour le service public. Entre la quasi-totalité des journaux télévisés réservée aux Chefs d’État successifs et la non-couverture de la voix contradictoire des régimes, la télévision nationale a toujours donné l’impression d’appartenir à un Individu, à un groupe restreint, à une classe déterminée.

Les journaux télévisés de la RTNC ne suivent pas les critères d’intérêt général ni de la dimension événementielle. Les nouvelles du Chef de l’État viennent en primeur quelles qu’elles soient, ensuite celles du Parlement, du gouvernement, ainsi de suite. C’est un principe canonique qui ne peut souffrir d’aucune exception. Et c’est depuis 1966.

Le traitement médiatique flatteur du nouveau président et de son camp par la RTNC paraît opportuniste aux yeux de plusieurs. La RTNC comme son père l’OZRT ( Office Zaïrois de Radiodiffusion et Télévision) s’est toujours échinée à travailler pour le Chef et son gouvernement. Les génériques de journaux les montraient si bien soit c’est Mobutu apparaissant dans les nuages ou Kabila prononçant de discours mémorables. C’est comme ça que la télévision nationale a été conçue. C’est un trait culturel. On ne pourrait rien.

Il faut sauver la chaîne nationale

Les régimes politiques successifs en RDC ont enfoncé la RTNC dans une bulle propagandiste. En sortir à force de tweets, de posts Facebook et autres, ça ne changera rien. Il faudrait une prise de conscience de la part des dirigeants.

Aujourd’hui l’UDPS est enfin au pouvoir. État de droit et démocratie à la bouche depuis 37 ans devraient concourir à l’assainissement de la Radio et de la Télévision nationales. Le service public devrait retourner dans ses fondamentaux qui sont le pluralisme, servir l’intérêt général et la diversité. Aucune démocratie n’est possible sans médias libres. La RTNC a été transformée depuis 62 ans en mouton de Panurge des régimes politiques. Sa mise sous tutelle du ministère de la communication et des médias fait d’elle une branche de l’architecture gouvernementale. Un Congo réconcilié est aussi celui où toutes les couches politiques et sociales se retrouvent dans la grande messe du 20 heures. J’ai peur pour les nouveaux dirigeants de tomber sous les câlins que leur font déjà les thuriféraires médiatiques. Les câlins c’est très bon mais ça endort.

Sortir la RTNC du gouffre où elle se trouve, c’est d’abord penser à son indépendance. Il n’y a pas d’indépendance éditoriale sans indépendance financière. Il faut pas se leurrer, c’est une vérité. Tant que la RTNC bénéficiera toujours de la subvention de l’État congolais plutôt que de la redevance tirée chez les congolais, rien ne va changer. Elle sera toujours au service de celui qui donne. Pourquoi pas la mettre sous tutelle à part entière du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel au Congo ?  Pas mal non ? Cette institution d’appui à la démocratie a permis sous son initiative aux candidats président de la République qui ont été tour à tour invités à la RTNC de présenter leurs programmes. Pourquoi ne devrait-il pas écrire une nouvelle charte pour la RTNC ? On va nous parler de prérogatives. Alors la maison se meurt, vous nous dites de consommer dix fruits par jour.

Il est temps de faire de la RTNC un vrai miroir de la société congolaise. Les 62 ans d’une télévision toujours avec les classes possédantes et non avec les classes populaires sont énormes. Le statut de la RTNC 2009 parle de la taxe que doit payer chaque congolais ayant un poste radio ou téléviseur pour le fonctionnement du service doit être appliqué. La leçon de démocratie qu’on pense prêcher aux autres devrait aussi passer par le petit écran. Encore faudrait-il qu’il ait de la volonté politique.

Read Previous

VL1: AS Vclub gagne CS Don Bosco 4-1

Read Next

VL1: sanga balende met Lupopo en difficulté et s’impose petitement

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *